Des confluences en mouvement, catalyser vers des mesures basculantes ?

Une démocratie pour vivre ensemble

L’archipel des Confluences s’est réuni ce samedi 27 janvier au siège de la Fondation Charles Leopold Mayer à Paris pour consolider les liens entre tisserands et organisations de la société civique. La journée a rassemblé plus d’une cinquantaine de personnes autant en visio qu’en présentiel.

Elle a commencé par un moment en petit groupe de 4 afin que nous prenions le temps de l’accueil et de l’interconnaissance. En effet, nous voulions ne pas lancer un tour de table qui aurait pris la matinée tout en restant attentif à la qualité de l’accueil. Accueillir est une marque de respect pour les personnes que l’on invite.

Afin de poursuivre dans cette même posture accueillante, une partie de l’équipe qui anime l’archipel des confluences depuis un peu plus d’un an a présenté l’intention que nous portions à plusieurs voix démontrant ainsi la diversité de nos parcours mais aussi la lucidité sur nos ambitions.

Un projet mégalodeste : comment construire une campagne qui dit Non au défaitisme ?

A partir du texte d’Edgar Morin en préface du dernier Manifeste d’Utopia et de son titre, Résister et créer, nous pouvons être dans une ambivalence. Doit-on résister puis créer ou créer puis résister ?

A l’Horizon de 2026 et 2027, nous rencontrons deux postures, de nombreuses personnes se préparent déjà à la victoire d’une coalition droite-extrême droite et à mener une résistance. D’autres affirment que cette période historique peut nous donner l’occasion de créer une nouvelle forme de mobilisation qui questionne les rôles et les places des acteurs de la démocratie.

Au sein de l’Archipel, nous avons choisi de se donner les moyens d’explorer ses formes, et les réseaux qui existent et foisonnent en France dans les marges de notre démocratie malade. Après l’exploration, il y a la nécessité de relier, de tisser, ce sont les tisserands que nous repérons et sont nombreux mais souvent isolés dans leur territoire ou leur silo thématique. Isolés car ne mobilisons pas suffisamment leurs réseaux dans la nécessité de ces relations. C’est pourquoi, en 2024, au sein des confluences, nous nous fixons une priorité : explorer, tisser mais surtout catalyser[1], « c’est-à-dire contribuer à accélérer des évolutions qui nous paraissent positives ou à réorienter d’autres qui nous paraissent insuffisantes ou moins souhaitables » En effet, la posture du catalyseur, permet de repérer les conditions de faire levier de transformation. Cette dimension plus stratégique a été l’objet de nos échanges durant cette journée.

Rendre visible nos prochains rendez-vous ne suffit pas

Lors du travail par petits groupes, deux dimensions se sont dégagées.

La première autour d’Alain Caillé et d’Antoine Valabrègue, ce groupe a proposé de lancer un grand mouvement de mobilisation citoyenne. Leur ambition est de reconstruire un projet de société avec les citoyens.

La seconde a été de consolider la dynamique de tissage en repérant des événements durant l’année 2024 qui permettent des rencontres. Et la place des tisserands, durant ces rencontres, doit permettre les liens et les rebonds entre ces différentes.

Comment articuler ces deux dimensions ?

Le premier atelier veut aller vite. Ils ont proposé un plan d’actions en plusieurs étapes. En février : formaliser et rédiger le projet sur la base d’un appel à contribution citoyenne puis contacter des réseaux. En mars, mobiliser des personnalités publiques qui soutiennent la démarche et constituer une équipe opérationnelle avec un réseau de soutien. Au second trimestre, créer un site web et développer des contacts internationaux.

Quels sont les moyens d’animation de cette initiative ? Alain Caillé le premier a évoqué la nécessité d’avoir 2 à 3 personnes qui « en font leur affaire ». L’appel est lancé et la question des moyens est un des premiers sujets pour les prochaines rencontres. Cette proposition a une dimension plus opérationnelle et met en mouvement une dynamique. Le seul fait d’inscrire des dates sur un calendrier ne fait pas récit, ni ne précise quels sont nos communs.

Le chemin peut se dessiner mais pour mobiliser, il faut donner quelques signaux plus clairs d’un projet politique de transformation. C’est sur ce point que cette proposition s’articule avec nécessité avec la stratégie initiale des confluences autour des explorateurs, tisserands et catalyseurs.

C’est en ce sens que la première dimension du « mouvement » peut s’articuler avec la seconde dimension de la reliance et de la catalyse. L’un peut vite s’épuiser et s’isoler quand l’autre peut relier sans catalyser, sans transformer, sans mettre en mouvement.

Des enjeux communs et la nécessité de mobiliser toutes les énergies sur des mesures basculantes ?

Ainsi, nous pourrions imaginer que cette articulation entre la dynamique des tisserands et l’ambition de mobiliser le plus grand nombre passe par des mesures basculantes. Est-ce que le fait de mettre en débat ces mesures sont susceptibles de mobiliser et de catalyser des dynamiques locales et nationales. La condition serait qu’elles soient en nombre très réduites afin d’éviter des « listes à la Prévert » et très ambitieuses tout en étant iconoclastes.

Le prochain rendez-vous est fixé le 14 mars pour une rencontre du Collectif de la transition citoyenne. Le thème est un rebond à notre rencontre, il porte sur la place des citoyen·nes et des organisations de la société civile dans les temps forts électoraux. A cette occasion, nous attendons des dizaines de participants, investis dans des actions locales et réseaux nationaux, une majorité questionne la nécessité de retrouver une autre place dans notre démocratie. Le plaidoyer ne suffit plus. Quelles formes sont à inventer pour que notre démocratie puisse vivre sur d’autres rythmes que celui des élections ?

Après le 14 mars, nous nous retrouverons à Marseille le 29 et 30 mars afin de creuser les enjeux de la cartographie, outils au service de la reconnaissance avec le soutien de transiscope.

Ainsi, l’archipel des confluences a décidé de « hacker » avec bienveillance les événements de nos alliés et les inviter/inciter/inspirer à sortir de leur couloir de nage, faire ce que tout le monde dit ! « Sortir de nous-même pour aller à la rencontre de l’autre », cet Autre porte des convictions et des expériences qui ne sont pas exactement ce que je porte : est-ce un problème ou une chance ?

Deux enjeux s’ouvrent à nous : faire apparaître les fils entre nous donne de l’énergie et de la force à l’ensemble des personnes et des organisations mais se donner des temps pour partager nos retours de ces rencontres est tout aussi indispensable.

Au-delà d’un calendrier de rencontres dans lesquelles nous allons utiliser la stratégie du « coucou », il nous faut poursuivre l’organisation de temps pour partager ce que l’on ramène de ces moments et en quoi, étape après étape, rencontre après rencontre, cela tisse un projet, un récit commun.

Sortir de nos cercles très typés principalement blancs et âgés, intellectuels diront certains, pleins d’expériences et de relations à partager diront d’autres, est d’abord un impératif. Nous savons que nous n’en avons pas les moyens seuls. Cette nécessité nous engage donc à devoir tisser des alliances et surtout à les favoriser. S’allier, ce n’est ni rejoindre, ni phagocyter, ni fusionner. Mais tisser le lien ne suffit plus, la catalyse suppose aussi de débattre et de se mettre d’accord sur des enjeux de fonds, des mesures basculantes. Est-ce suffisant ? C’est peu probable mais nous allons expérimenter si cette proposition résonne avec d’autres acteurs et personnes investies.

Sur le prochain article, je reviendrai sur la seconde partie de cette journée du 27 janvier autour des retours d’expériences de la Primaire populaire, du labo des partis et de la fabrique de la transition.


[1] https://www.archipel-confluences.org/WikiAdC/?Attitudes